La place de l’industrie dans l’économie et le territoire français depuis 1945

Bonnes Copies

Bonne Copie du lycée Bergson d’Angers. Cette copie a été notée 16/20. Le commentaire du professeur est : Bon devoir clairement argumenté et structuré. Carte intéressante. C’est très bien.

Bonne copie du lycée : 49 - Angers - Lycée Bergson

Cette copie a été notée : 16 / 20

Commentaire du professeur : Bon devoir clairement argumenté et structuré. Carte intéressante. C’est très bien.


Untitled Document Bien qu’un des pionniers de la Révolution Industrielle du XIXème siècle avec l’Angleterre, la France est longtemps restée un pays de tradition agricole avec, notamment, une part encore largement majoritaire des actifs agricoles dans la population durant la première moitié du XXème siècle. L’industrie, dans laquelle on englobe toutes les activités qui interviennent dans la transformation de produits bruts en produits manufacturés et qui correspond au secteur secondaire dans la classification statistique, ne prend véritablement son essor qu’au sortir de la Deuxième Guerre Mondiale.
Quelle est alors l’évolution du secteur industriel français depuis 1945 ? Quelle est sa part dans l’activité économique du pays ? Est-ce un facteur d’organisation de l’espace ?
Deux grandes phases sont à distinguer dans l’évolution de l’industrie française, auxquelles il faut associer des facteurs de localisation industrielle. L’industrie connaît tout d’abord un essor considérable durant les Trente Glorieuses. Il subit ensuite, à partir des années 1970, un certain déclin et certaines branches sont en crise. Nous verrons, dans les deux cas, quels sont les facteurs explicatifs. Tout cela nous amènera à nous interroger sur l’évolution récente de l’industrie afin de pouvoir trancher : désindustrialisation ou restructuration ?


En 1945, à la Libération, toute l’économie du pays est à reconstruire ; les infrastructures industrielles et de transport ont été les plus touchées étant donné leur rôle crucial dans l’industrie de guerre et les combats. Avec la croissance mondiale prodigieuse des Trente Glorieuses, l’industrie devient le secteur prédominant en France et va maintenir le pays au deuxième rang européen et au quatrième rang mondial derrière les Etats-Unis, le Japon et l’Allemagne. Comment s’effectue et s’explique cette évolution et quels en sont les impacts spatiaux ?
La part de l’industrie dans le PIB de la France durant cette période est considérable ; de même que la part du secteur secondaire dans les actifs qui dépasse rapidement celle du secteur primaire en se rapprochant de 35%. Ce sont surtout les industries de la Seconde Révolution Industrielle qui sont exploitées, c’est-à-dire l’automobile (avec Renault et Citroën) et les industries de transport d’une manière générale, l’électricité, toutes les industries liées au pétrole, la chimie avec Rhône-Poulenc…
Cela s’explique bien évidemment par la conjoncture économique favorable à la consommation de masse mais surtout par le développement des échanges : désormais l’industrie française est une industrie qui s’exporte, notamment en ce qui concerne les biens d’équipement et les machines-outils. Ce sont bien les échanges commerciaux qui soutiennent la croissance. Cet essor industriel s’explique aussi surtout par l’apogée du système fordo-tayloriste conçu par et pour le secteur industriel. On voit apparaître de grandes usines telles que celle de Renault à Boulogne-Billancourt et l’organisation scientifique du travail, mécanisation et travail à la chaîne, permet d’obtenir des gains de productivité énormes. Mais ceci n’est pas propre à la France ; ce qui fait son originalité, c’est le rôle de l’Etat dans l’essor industriel. En effet, il intervient d’une part par le biais de la planification dirigée par Jean Monnet à partir de 1947 et qui fixe les secteurs prioritaires et les objectifs de développement économique à atteindre. D’autre part, il intervient avec sa politique d’aménagement du territoire en contribuant à la décentralisation des activités industrielles (notamment au Mans et à Rennes pour l’automobile). Enfin, il faut ajouter à cela, en ce qui concerne la place de l’industrie dans l’économie française, le rôle du Plan Marshall et celui joué par la construction européenne qui a débuté dans le secteur industriel avec la création de la CECA en 1951, zone de libre-échange pour le charbon et l’acier.
Durant cette période de forte industrialisation, les localisations industrielles sont restées sensiblement les mêmes que celles de la Révolution Industrielle, contribuant au maintien de l’inégale répartition des activités industrielles de la France au profit de la moitié Est du pays. Ainsi, les régions du Nord-Pas-de-Calais et de la Lorraine proches des matières premières se sont confirmées tout comme les grands centres que sont l’Île de France et la région lyonnaise.
Toutefois, à cela s’ajoute un nouveau phénomène de littoralisation des activités qui découle de l’essor des échanges internationaux et de la dépendance accrue, à partir des années 1960, de l’industrie française vis-à-vis de l’énergie (le taux de dépendance énergétique de la France est proche de 70% au début des années 1970). Dès lors, les activités industrielles telles que la pétrochimie ou la sidérurgie ont tendance à s’installer sur des sites portuaires. Ainsi est créé celui de Dunkerque puis de Fos-sur-Mer près de Marseille. Malgré les efforts de décentralisations industrielles et la littoralisation des activités, l’inégale répartition Est-Ouest demeure.
L’industrie va difficilement pouvoir maintenir sa place prédominante dans l’économie avec l’arrivée de la crise.


A partir des années 1970, la part des actifs dans le secteur industriel commence à diminuer pour atteindre 25% aujourd’hui. Plus d’un million d’emplois industriels disparaissent en 20 ans et certains secteurs (textile, sidérurgie, métallurgie, industries navales) connaissent une crise profonde ce qui affecte plus particulièrement des régions comme le Nord-Pas-de-Calais ou la Lorraine. Ce déclin s’explique de diverses façons.
En premier lieu, le système fordo-tayloriste se grippe : les gains de productivité ralentissent alors que les coûts de production (matière première et main d’œuvre) restent les mêmes. En outre, l’équipement industriel commence à vieillir et de nombreux investissements nécessaires trouvent difficilement des financements. D’où la fermeture de certaines industries et des licenciements importants.
Les chocs pétroliers aggravent la situation puisque les industries françaises sont très dépendantes vis-à-vis du pétrole et les coûts de production s’en retrouvent augmentés. De plus, certains secteurs voient apparaître la concurrence de pays émergents comme la Corée du Sud en matière de construction navale ou les " Bébés-Tigres " pour l’électronique et le textile. Quelles réponses, quelles solutions sont alors apportées à ce déclin ?
La pensée néo-libérale dominante durant cette période considère qu’il s’agit là d’un assainissement nécessaire du système économique. Toutefois, quelques mesures sont prises. Face à la crise énergétique, le gouvernement français décide de développer la filière nucléaire et il dote pour cela le pays d’un réseau et d’infrastructures modernes. Il met également en place des plans de restructuration et de reconversion des régions en difficulté (NPC, Lorraine). Viennent en plus les aides provenant de la politique régionale européenne dont le FEDER (Fonds Européen de Développement Economique Régional) inclut les vieilles régions industrielles dans les régions à aider.
Il s’ensuit de nouveaux rapports de force régionaux à partir des années 1970. Les industries préfèrent alors s’installer dans le Sud et dans des sites privilégiés comme les technopoles que l’Etat et les collectivités territoriales tendent à développer et qui allient les activités industrielles aux laboratoires de recherche et aux établissements de formation de haut niveau. Une fois de plus, même si l’on note une tendance de délocalisation vers ce que l’on appelle le " croissant lumineux " qui va de la Bretagne au Midi-Pyrénées, le déséquilibre Est-Ouest des activités industrielles reste important.

Comment analyser ce changement industriel des 25 dernières années ? Peut-on véritablement parles d’une désindustrialisation de l’économie française ? Ou ne faut-il pas plutôt considérer ceci comme une étape nécessaire à la modernisation de l’appareil productif ?
Il faut tout d’abord souligner les récents succès de l’industrie française. Certes, ses effectifs ne sont plus ce qu’ils étaient, mais elle connaît surtout depuis quelques années des réussites éclatantes. La balance commerciale est à nouveau excédentaire depuis 1992 et les exportations industrielles françaises font partie des plus importantes. Elle possède, en outre, de grands groupes industriels comme Vinci et des technopoles de qualité (Sophia-Antipolis à Nice).
On peut citer trois secteurs industriels en forte progression. L’industrie des transports est très réputée pour sa qualité notamment grâce au TGV et à des entreprises comme Alstom. Désormais, des commandes ont été prises par les Etats-Unis pour équiper la ligne ferroviaire Boston-New York et un projet se dessine en Floride. Ce secteur est donc une source de richesse et donne une image de qualité à la France (cf. aéronautique). Il en est de même pour l’industrie navale française qui connaît un renouveau spectaculaire depuis 3 ans. Ainsi, les Chantiers de l’ Atlantique de Saint-Nazaire ont des carnets de commande remplis, connaissent des problèmes de main d’œuvre et sont contraints de faire appel à la main d’œuvre étrangère et de délocaliser (à Brest, par exemple) une part de leurs activités pour y remédier. Enfin, cet essor provient également de l’essoufflement de la conjoncture asiatique. Un modèle de modernisation de l’industrie française se situe dans le secteur de la sidérurgie. Ce secteur a pourtant été un des plus touchés par les difficultés. Mais grâce aux plans de restructuration et de modernisation, la sidérurgie française est une des plus concurrentielles au monde (cf. Usinor).
Enfin, il faut noter que l’interpénétration accrue des secteurs secondaire et tertiaire rend difficile l’évaluation de la place de l’industrie dans l’économie française. En effet, La modernisation des activités industrielles fait qu’elles externalisent de plus en plus et font davantage appel à des services extérieurs à l’entreprise, aussi bien à des services de conseil financier que d’entretien. Par conséquent, le déclin des actifs et du nombre d’entreprises dans le secteur secondaire ne signifie pas forcément un déclin de la place de l’industrie dans l’économie puisque certaines parties de l’activité industrielle se retrouvent dans les Services.
La place de l’industrie sur le territoire n’a pas véritablement changé au niveau de la répartition nationale si ce n’est une tendance persistante à la littoralisation mais au niveau de son implantation locale au sein des technopoles.


L’industrie française apparaît aujourd’hui comme un moteur de la croissance européenne, davantage même que l’Allemagne qui commence à connaître quelques essoufflements. En effet, les industries d’Outre-Rhin n’ont pas encore effectué totalement cette tâche de restructuration et de modernisation de l’appareil productif qui fait aujourd’hui de la France un des modèles de productivité. Mais ce nouvel essor est vraiment très récent. Aussi manque-t-on de recul : tient-il plus de la conjoncture économique favorable actuelle ou plus d’une refonte et modernisation durable de l’industrie française ?