L’Europe est née des crises, elle sera la réponse apportée à ces crises. Ce jugement de Jean MONNET vous paraît-il fondé au regard de l’évolution de la construction européenne depuis 1945.

Bonnes Copies

Bonne Copie de l’IPESUP de Paris. Cette copie a été notée 12/20. Le commentaire du professeur est : Il faut rattacher tout ce que vous dites au sujet. Vous touchez beaucoup de choses du doigt mais la formulation reste inaboutie. Vous aviez cependant tous les éléments nécéssaires.

Bonne copie du lycée : 75 - Paris - IPESUP

Cette copie a été notée : 12 / 20

Commentaire du professeur : Il faut rattacher tout ce que vous dites au sujet. Vous touchez beaucoup de choses du doigt mais la formulation reste inaboutie. Vous aviez cependant tous les éléments nécéssaires.


Untitled Document Le mouvement paneuropéen (1922) du Comte Coudenhove-Kalergi ou même l’idée d’ "Etats-Unis d’Europe" de Victor HUGO montre que la notion d’Union Européenne est ancienne. Pourtant, c’est à partir de 1945 que la construction européenne démarre avec comme premier objectif : empêcher le retour de la guerre.
Peut-on penser, comme le dit Jean MONNET, que : "l’Europe est née des crises, elle sera la réponse apportée à ces crises ?"
La construction européenne a évolué avec ces crises. Ses institutions ont tenté, grâce aux différents organismes qu’elles ont fondés, de répondre à celles-ci (I). L’Europe a-t-elle vraiment résolu ces crises ? D’autres raisons n’ont-elles pas fait évoluer la construction Européenne ? (II) Une nouvelle Europe est en train de se construire pour prévenir ses crises. C’est une Europe à vocation économique, politique, sociale et culturelle. Les enjeux étant l’affirmation d’une puissance face aux Etats-Unis et au Japon et la construction d’une Europe libérale, solidaire et unie.

Avec le début de la guerre froide, en 1947, l’Europe se divise en deux blocs : l’Europe de l’Ouest s’allie avec les Etats-Unis, l’Europe de l’Est avec l’URSS. Cette alliance met en place une coopération économique et militaire entre les pays d’Europe de l’Ouest. La coopération économique se met en place avec le plan Marshall et la création de l’OECE en 1948, regroupant les pays d’Europe de l’Ouest. L’OECE devait répartir entre les pays membres, les aides provenant du plan Marshall. La coopération militaire apparaît avec la création de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord, en 1949, regroupant les pays d’Europe de l’Ouest et les Etats-Unis. Cette organisation met en place un système de défense contre le bloc communiste.
Le premier objectif de la construction européenne étant d’empêcher la guerre, celle-ci va tenter de le remplir par le biais d’une coopération économique. Au lendemain de la seconde guerre mondiale, les relations franco-allemandes restent très tendues. Pourtant, dès 1949, le plan Schuman mais aussi les pères fondateurs de l’Europe (Jean Monnet en France, Adenauer en Allemagne) montrent que l’un des principes fondateurs de l’Europe sera l’axe franco-allemand. Ils décident alors, pour améliorer ces relations, et éviter toute guerre, de mettre en place la CECA en 1951. Cette coopération économique sur le charbon et l’acier (matières premières stratégiques au niveau militaire) regroupe six pays : Belgique, Pays-Bas, Luxembourg, République Fédérale d’Allemagne, France et Italie. Cette organisation permet le contrôle des productions du charbon et de l’acier dans ces six pays. L’axe franco-allemand va alors devenir l’axe principal de l’Europe même si cette coopération est économique plus que politique durant cette période. L’axe franco-allemand a un rôle déterminant dans la relance d’une Europe financière lorsqu’elle met en place le SME en 1979 (axe Giscard-Schmitt) pour tenter d’éviter les fluctuations monétaires des monnaies des pays membres de ce système.
L’Europe va devenir importante avec la résolution de trois crises. Tout d’abord, la mise en place de la Politique Agricole Commune dès 1962 va résoudre le problème agricole européen à savoir : isoler le marché européen des turbulences du marché mondial mais aussi maîtriser les productions. Cette politique a aussi été un test pour faciliter la mise en place d’autres politiques. L’Europe ne peut vraiment s’affirmer sans l’adhésion de la Grande-Bretagne. Cette intégration britannique va être longue puisque son adhésion sera refusée à deux reprises (1963 et 1967) à cause de sa trop grande coopération avec deux autres blocs : les Etats-Unis et le Commonwealth. L’arrivée au pouvoir de Georges Pompidou en France en 1969 facilite son adhésion effective en 1973. Le manque de cohérence des institutions européennes fait apparaître une nouvelle crise en juin 1965. De Gaulle conteste l’idée que le budget européen (incluant celui du FEOGA) soit voté à la majorité. Cette crise a mis en péril la communauté européenne mais 6 mois plus tard, le problème a été résolu avec l’instauration du vote à l’unanimité (permettant ainsi aux nations d’avoir un droit de veto).

Cependant, malgré les crises qu’a traversées l’Europe, d’autres projets, donnant sa véritable mesure, ont été mis en place en dehors de tout contexte de crise. La signature du traité de Rome, le 25 mars 1957, met en place un " marché commun " mais aussi une coopération technologique avec l’Euratom. Avec ce traité, instituant la Communauté Economique Européenne (CEE), ce n’est pas une réponse à une crise mais au contraire un premier pas vers une union européenne. Cette volonté de libre-échange était déjà apparu avec le Bénélux (1948) mettant en place entre la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas une politique visant à libéraliser leurs échanges. De même, cette volonté d’intégration va se confirmer dans les années 80, avec les accords de Schengen (1985) permettant la libre circulation des hommes et l’Acte Unique de 1986, avec quatre mesures : la libre circulation des hommes, des capitaux, des biens et des services. Ces mesures seront effectives le premier janvier 1993.
L’Europe n’apporte pas toujours la réponse à ses crises. L’échec de la communauté européenne de défense (rejeté par l’Assemblée Nationale en France en 1954) montre que l’Europe n’a pas su établir de système militaire pouvant empêcher ses crises.
L’Europe s’est montré inefficace vis-à-vis de la crise des années 70, à deux niveaux : au niveau monétaire et agricole. Sur le plan monétaire, le serpent monétaire mis en place en 1974 a tenu peu de temps, car il n’a pas su contrôler les fluctuations monétaires dues à l’inflation et à la crise du dollar. De plus, il n’avait aucun moyen financier pour minimiser ces fluctuations. La France est alors obligée de quitter le serpent monétaire en 1976. Sur le plan agricole, le FEOGA ne mettra en place un plan de relance qu’en 1979.
L’Europe a tenté d’affirmer son identité en instaurant des rapports privilégiés avec certains pays du Tiers-Monde. Elle a souhaité préserver ces relations, les 3 premières puissances coloniales étaient des puissances européennes. Cette volonté d’indépendance vis-à-vis des Etats-Unis va se mettre en place avec les accords de Yaoundé mais aussi les accords de Lomé. Cette coopération économique tente de faciliter le développement des PED mais cette aide ne concerne pas tous les pays.

L’Europe tente maintenant d’affirmer son identité afin de prévenir ses crises mais aussi s’établir en tant que puissance économique et politique. Une identité européenne est en train de se façonner. Comme le montre le Portrait social de l’Europe, il existe une convergence des modes de consommation : les paysages urbains des capitales européennes (Paris, Londres, Berlin,…) se ressemblent de plus en plus.
Une volonté d’harmonisation, au niveau social, permet la création de lois sociales européennes mais aussi de syndicats européens : CEEP (regroupant les syndicats des entreprises publiques), l’UNICE (regropant les patrons), le CES (regroupant les syndicats ouvriers : 74 actuellement). Cette idée d’harmonisation des syndicats ayant pour but d’affirmer une volonté de contestation plus grande des différents groupes sociaux.
Il en est de même pour le système fiscal, financier (création de l’Euro, de la Banque Centrale Européenne avec à sa tête Wim Duisenberg) mais aussi éducatif avec la mise en place d’échange entre les différents pays membres (programme Socrates) au niveau des universités (ERASMUS) et des lycées (COMENIUS).
Cependant, des débats demeurent sur l’avenir de l’Europe. D’un point de vue économique, le budget reste un dossier problématique. Les négociations sur les participations de chacun des pays sont très difficiles (Agenda 2000 où l’Allemagne a tenté de réduire sa participation dans le budget). Le problème de l’élargissement de l’Europe de l’Est se pose encore. Certains pays ne la souhaitent pas (Mitterand disait déjà en 1989 qu’ils devraient attendre " plusieurs décennies ", d’autres préfèrent que l’Europe se consolide avant de les accepter. Les premiers pays de l’Europe de l’Est devant adhérer (vers 2008) étant : la République Tchèque, la Pologne, la Hongrie et la Slovénie. Même si les pays de l’Est représentent un marché de 110 millions de consommateurs, la production agricole augmenterait considérablement (obligeant alors la PAC à augmenter son budget de 50%).

Ce jugement de Jean MONNET est fondé dans le sens où l’objectif premier de l’Europe était d’empêcher toute guerre. Cependant, l’Europe, au cours de sa construction, a aussi obtenu une véritable dimension en dehors de tout contexte de crise et n’a pas toujours su apporter une réponse à ses crises. Le problème actuel de la Yougoslavie montre que cet objectif de paix n’a pas été entièrement rempli, mais aussi que, malgré une volonté d’émancipation, les Etats-Unis ont toujours une influence sur l’Europe d’un point de vue militaire. Cette influence peut s’atténuer avec la mise en place d’un projet de défense et d’indépendance logistique (programme Galiléosat).