Lexique des principaux termes en Culture générale

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- M -

Médiation, médiat, immédiat 
Est médiat ce qui est en relation indirecte avec autre chose, par l’entremise d’un certain nombre d’intermédiaires, qui sont autant de médiations. Le raisonnement (le syllogisme, par exemple) est en ce sens une connaissance médiate, la médiation étant assurée par le moyen terme du syllogisme (dans le syllogisme « Socrate est un homme, or les hommes sont mortels, donc Socrate est mortel », « homme » est le moyen terme). Est immédiate, au contraire, la liaison directe entre deux éléments (deux objets de pensée, ou la pensée et son objet), qui se passe d’intermédiaire. L’intuition est la connaissance immédiate par excellence.

 

- N -

Nécessaire 
Ce dont le contraire est impossible.

 

- P -

Politique
Du grec polis, la cité. Le terme « politique » renvoie à tout ce qui concerne un pouvoir central, organisé et disposant d’une puissance de contrainte, exercé sur la totalité d’une collectivité et d’un territoire. Au masculin, le politique signifie soit « l’homme politique », soit « la réalité politique » en général. La politique, au féminin, désigne soit l’action ou la théorie politique (en anglais policy), soit le champ ouvert de la confrontation des ambitions et des projets politiques (en anglais politics).
 
Prince
Du latin princeps, le premier. Le terme prince désigne, dans le vocabulaire de la philosophie politique, le(s) détenteur(s) physique(s) du pouvoir, soit souverain, soit exécutif. Il ne faut pas confondre ce sens avec celui qu’il prend dans le vocabulaire féodal, et qui désigne un titre de noblesse.
 
Partage
Le mot autorise des glissements de sens intéressants :
Ce que l'on partage, on le prend en commun. Mais le partage, c'est aussi la division en parties…
Dés lors si les amis se reconnaissent par ce qu'ils partagent, n'est-ce pas aussi désigner ce qui les oppose ? Qui se ressemble trop s'assemble -t'il vraiment ?
La similitude, l'égalité n'ouvrent-elles pas plutôt à des concurrences ? 
 
Perspective (La)
Trecento : désigne en italien le siècle commençant par 1300, en français le quatorzième siècle
Quattrocento : de même, désigne en italien le siècle commençant par 1400, en français le quinzième siècle
raccourci : réduction que l’on fait subir à une figure vue en perspective
point de vue, ou centre de projection : la place que le spectateur doit occuper pour identifier la représentation car c’est le point d’où partent les rayons de projection
plan de projection (c’est le tableau): plan vertical sur lequel les objets sont projetés, à partir du centre de projection
géométral : le plan horizontal supposé sur lequel le plan de projection est élevé
ligne de terre (c’est la base du tableau) : ligne suivant laquelle se coupent le géométral et le plan de projection
ligne d’horizon : intersection du tableau avec le plan horizontal passant par le centre de projection
point de fuite : endroit où semblent se rejoindre les parallèles du tableau
point de distance : point où viennent aboutir les diagonales du tableau 
 
Pouvoir 
Le pouvoir est la capacité d'un groupe à agir sur un individu. Tandis que, selon Hannah Arendt, le pouvoir implique le rassemblement d'un peuple qui seul le rend légitime, potestas in populo (le pouvoir est dans le peuple), la violence par contre peut se passer du consentement du nombre par sa dimension instrumentale, son utilisation des armes.
Arendt réagit ainsi contre l'analyse classique qui garde une définition du pouvoir - entendu comme une «violence mitigée» (Alexandre Passerin d'Entrèves, The Notion of State, OUP, Oxford 1967) - proche de la définition de la guerre par Clausewitz : «un acte de violence visant à contraindre l'adversaire à exécuter notre volonté» (voir l'analyse conceptuelle pour la pensée d'Hannah Arendt). 
 
Pensée ou connaissance discursive 
Connaissance médiate, mouvement de la pensée qui passe par un certain nombre de connaissances ou de représentations intermédiaires pour progresser vers une connaissance nouvelle. Son modèle, c’est l’enchaînement logique des raisons dans la déduction. C’est le contraire de la pensée intuitive (ou connaissance immédiate).

 

- R -

Rationnel 
Ce qui est accord avec les principes que la raison tire d’elle-même.
 
Raisonnable
Ce qui est accord avec les règles que la raison tire de l’expérience.
 
Rationalité 
Caractère de ce qui correspond aux exigences logiques de la raison.
 
République
Du latin res publica, la chose publique, les affaires publiques. Jusqu’au XVIIIe siècle, le terme désigne l’État en général, en tant que réalité abstraite et collective, quel que soit le régime (monarchique, oligarchique ou démocratique). À la fin du XVIIIe siècle – notamment depuis Rousseau –, le terme devient synonyme d’État de droit, voire de démocratie : un État gouverné selon des lois et l’intérêt général et non selon une volonté arbitraire, dans lequel les détenteurs du pouvoir ne le sont qu’en vertu de mandats révocables.

 

- S -

Sociologie
Terme forgé par le philosophe français A. Comte au début du XIXe siècle, sous l’influence de H. de Saint-Simon, qui avait quant à lui imaginé le terme de « physiologie sociale ». La sociologie, ou théorie de la société, part du postulat selon lequel une société obéit à des lois qui lui sont propres, lois de type mécanique ou naturel analogues à celles qui existent dans la nature, et qui imposent aux membres de la société certains comportements, indépendamment de leur volonté et de leur conscience individuelle.
 
Sympathie
Capacité à souffrir avec, ensemble. Ce qui est alors partagé c’est ici la douleur et la peine. Eprouver de la sympathie pour quelqu’un c’est donc s’associer à son chagrin. Le mot trouve en réalité son synonyme avec compassion. 
 
Souverain, souveraineté
Du bas latin superanus, supérieur. La souveraineté caractérise le pouvoir politique dans l’État moderne, qu’il soit monarchique, oligarchique ou démocratique. Le pouvoir souverain est un pouvoir qui n’est subordonné à aucun autre, et auquel tous les autres pouvoirs sociaux sont subordonnés. Le souverain est le détenteur du pouvoir souverain, c’est-à-dire essentiellement du pouvoir législatif, puisque c’est par la loi que la volonté de l’État se trouve définie, les pouvoirs exécutif et judiciaire n’étant que des instruments de cette volonté. C’est pourquoi le président de la République, ou le premier ministre, dans la République française, ne peuvent être considérés comme « souverains » : le peuple, soit directement soit à travers ses représentants, est dans ce cas le véritable « souverain ». Ne pas confondre donc les termes « souverain » et « monarque ». 
 
Symbole 
Bergson utilise ce terme au sens large, pour désigner les éléments de toute expression ou représentation. La représentation graphique d’un mouvement, l’expression algébrique, ou l’écriture alphabétique sont autant de symboles dont se sert l’analyse (ou l’intelligence) pour connaître.
En un sens proche, Leibniz appelle connaissance symbolique toute connaissance qui substitue aux choses des signes qui les représentent. Cette connaissance est nécessaire lorsque les objets à connaître sont complexes et ne peuvent être saisis par intuition. La connaissance symbolique est aveugle, puisqu’elle autorise une manipulation de signes disjointe de toute vision intuitive. Mais les signes dont elle se sert sont sensibles, et supposent donc une intuition sensible pour être compris. 

 

- T -

Terrorisme 
Par terrorisme, on entend un usage de la violence qui ne peut être compris comme une pratique sociale car son contenu (enlèvement, assassinat de civils sans défense, attentat qui n'ont parfois pas d'autre objectif que de multiplier le nombre de morts et blessés) ne correspond ni à un acte de guerre (pas d'affrontement armé déclaré), ni à une revendication politique ou sociale. Le terrorisme en ce sens tue la société. Le but visé est en effet de détruire le lien social comme tel par la terreur qu'il provoque parmi ses victimes, par la haine qu'il exprime (et qu'il attise en retour) à l'égard de personnes innocentes et éliminées parce qu'elles sont dans l'espace public visé à ce moment-là et enfin par la destruction du lien social qui caractérise la clandestinité, la prise d'otage et l'attentat-suicide, le terroriste annulant sur sa personne toute possibilité d'une relation de justice, de réparation, de pardon. Cette destruction du lien social ou atomisation des individus a pour corollaire la mise en cause de l'unité du pouvoir, le terrorisme obligeant souvent le pouvoir à une duplicité, en particulier au double discours entre la déclaration de justice (châtier sans négocier, ne pas céder au chantage) et la pratique du secret (infiltrer les réseaux, négocier pour se protéger, passer des accords secrets pour des trêves, pour une "sanctuarisation" du territoire nationale) mais à aussi à la discrimination en retour entre citoyens à sécuriser et citoyens à suspecter de complicité de par leur identité socio-culturelle. Une des caractéristiques de l'itinéraire terroriste mis en lumière par Michel Wieviorka, ( Face au terrorisme, Liana Levi 1995), est la substitution du terroriste à sa cause : le terroriste se réclame avec une violence d'autant plus aveugle à sa cause que celle-ci disparaît (par exemple, la lutte pour l'émancipation de la classe ouvrière au moment où celle-ci a déjà disparu dans la fracture sociale et où les ouvriers ne se reconnaissent pas dans le discours idéologique des combattants extrêmistes). L'engrenage de la pratique terroriste est tel que cette violence - qui finit par toucher non plus seulement l'ennemi mais l'ancien allié, le partisan qui ne soutient pas l'extrêmisme ou l'individu censé être défendu dans cette cause et qui n'en devient pas partisan - cette violence totale désolidarise le terroriste de ceux dont ils se réclament (libération nationale, révolution sociale**) ; la cause justifie d'autant plus la violence extrême aux yeux du terroriste que celui finit par être le dernier à la défendre, la cause indéfendable étant l'absolutisation d'une cause, quelle qu'elle soit.
**Ceci rejoint la loi de développement des idéologies totalitaires du stalinisme ou du nazisme, analysées par Hannah Arendt : «il est dans la nature des politiques idéologiques que le contenu réel de l'idéologie (la classe laborieuse ou le peuple allemand), qui fut à l'origine de "l'idée" (la lutte des classes comme loi de l'Histoire ou la lutte des races comme loi de la Nature), soit dévoré par la logique avec laquelle "l'idée" est mise à exécution» (Le système totalitaire, p.222).
 
Totalitaire, totalitarisme
L’adjectif « totalitaire » est employé pour la première fois par Mussolini lors d’un discours de juin 1925, dans l’expression « farouche volonté totalitaire ». Le terme de totalitarisme, qui a été utilisé dans un premier temps par les théoriciens du fascisme, a été repris par les historiens et les spécialistes de sciences politiques pour décrire un certain type de régime politique contemporain (essentiellement le fascisme, le nazisme et le stalinisme). Ce terme est donc inséparable d’une réalité politique apparue au XXe siècle : il est toujours impropre de l’employer pour qualifier des régimes non démocratiques classiques, notamment la monarchie d’Ancien Régime. Le totalitarisme est un projet politique visant à assurer à un parti une domination totale sur la société au nom d’un but idéologique. Cette domination totale suppose l’abolition de la séparation entre les sphères privée et publique et l’endoctrinement permanent, ainsi que le droit illimité à la destruction des populations considérées comme constituant des obstacles à l’accomplissement du projet idéologique, même si celles-ci n’ont en réalité aucune activité politique.
 
Tyran, tyrannie
Du grec turannos. Le mot tyran désigne au sens premier un souverain illégitime, ayant acquis par usurpation sa fonction monarchique (soit qu’il se soit emparé, par force ou par ruse, de la dignité royale sans être le successeur légitime du monarque ; soit qu’il ait imposé son pouvoir contre la volonté d’un peuple et les institutions d’une République). Au sens large, le mot « tyran » se confond avec les termes « dictateur » ou « despote ». 

 

- U -

Universel 
Ce qui n’admet aucune exception possible.
 
Utopie, utopique
Du grec ou (négation) et topos, le lieu. Le terme désigne à l’origine, dans l’œuvre éponyme de Thomas More (1516), une île imaginaire, située « nulle part », gouvernée selon les principes purs de la justice et de la rationalité. Plus généralement, une utopie est la représentation romancée et détaillée d’un projet politique supposant une transformation radicale du réel. Le terme est souvent pris en un sens péjoratif, pour désigner une entreprise excessivement idéaliste et donc fantaisiste et irréalisable. 

 

- V -

Violence abstraite, violence physique 
Dans l'analyse de cette paire de notion, il s'agit de garder à l'esprit deux principes qui sont autant des axes pour analyses que des règles éthiques, des formes de la pudeur essentielle qui doit caractériser ultimement le discours devant la réalité du mal.
D'une part considérer qu'il y a un seuil entre le viol des consciences et le viol d'une personne. Le viol des consciences consiste à ordonner à une liberté de s'auto-contraindre par le chantage affectif, le terrorisme intellectuel, la normalisation des pensées par la propagande, etc…Une de ses formes les plus subtiles - et dénoncée comme violence par exemple par les théoriciens de l'anarchisme - est le principe de l'engagement tacite à la vie sociale chez Rousseau : «quiconque refusera d'obéir à la volonté générale y sera contraint par tout le corps : ce qui ne signifie autre chose sinon qu'on le forcera d'être libre» ( Contrat social, I, 7). Dans le cas d'un viol, la violence commise en forçant une personne à une relation sexuelle porte atteinte bien plus qu'à son intégrité physique (voir l'analyse du texte sur la torture).
D'autre part, on ne peut nier la violence abstraite. Celle-ci n'est pas une abstraction mais bien la violence spécifique à l'abstrait qui est d'autoriser la violence physique, de donner une autorité légitimant le passage à l'acte. L'autorité n'est pas identique à la chose mais, selon l'étymologie, lui ajoute une dimension d'être qui la rend possible, qui la laisse être : «la violence symbolique ajoute réellement une dimension à la violence, sans laquelle celle-ci en général ne serait pas possible, c'est-à-dire qu'elle ne pourrait ni s'organiser, ni se généraliser, ni se soutenir subjectivement» (Etienne Balibar, «la violence des intellectuels», revue Lignes, 1995, n°25, pp.10-11).
Comme forme de violence abstraite on peut également songer à la "violence sans acteur" : c'est le cas de cette «violence inerte», la violence par inertie sociale, c'est-à-dire le fait que «les mécanismes économiques et sociaux - tout en se déroulant légalement - produisent et reproduisent non seulement les inégalités mais aussi la misère et la souffrance [des humains]» (E. Balibar, Lignes p.31). Il faut également envisager toutes les formes de violence par omission ou «violence par prétérition» (Jean Poirier). Ceci renvoie au cas où violence est faite par la démission du sujet responsable : ainsi en est-il de la négligence coupable d'un citoyen ou même de l'Etat qui n'intervient pas pour prévenir une catastrophe ou réparer une injustice, tel l'exemple d'un classement sans suite judiciaire d'un dossier en cas de scandale politique, et toutes les autres situations où le pouvoir décide de ne pas appliquer la «force injuste de la loi» selon les termes d'un Président français, décisions qui font oeuvre de violence en contribuant à fragiliser la vie commune par leur désintérêt de l'intérêt public.